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Rémunération des agents de la Fonction publique: Un système, des indemnités diverses, mille équations
Publié le jeudi 30 aout 2018  |  Sud Quotidien
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© aDakar.com par DG
Atelier sur la restructuration des grilles salariales de la fonction publique
Dakar, le 29 août 2018 - Un atelier sur la restructuration des grilles salariales de la fonction publique s`est ouverte ce matin, à Dakar.
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Que cache l’Etat du Sénégal en refusant, pour le moment, de rendre public l’étude générale portant sur le système de rémunération de la Fonction publique, réalisée par le cabinet MGP Afrique ? Aussi, les résultats d’une étude de l’Inspection générale d’Etat (IGE) sur le même objet et transmis à Macky Sall, ne sont pas encore disponibles. Les représentants des organisations syndicales, des agents de l’Etat l’ont réclamé hier, mercredi 29 août, à l’occasion du lancement des travaux de l’atelier de partage des conclusions de l’étude. Pour mesurer l’immensité du travail attendu par les services de l’Etat et une véritable volonté politique, il faudrait mettre à disposition ce document. En effet, lors de la cérémonie d’ouverture, il a été relevé que les primes et indemnités sont passées de 47 milliards en 2004 à 149 milliards en 2012. Sous le régime de Macky Sall, on peut noter une indemnité de 500.000 F Cfa accordée aux épouses des ambassadeurs et d’un million à d’autres fonctionnaires. On assiste ainsi à un système désarticulé dont les pistes de solutions sont attendues à l’issue de cette rencontre.

Alors que l’on s’acheminait vers une année blanche, le chef de l’Etat, Macky Sall, avait accepté d’augmenter l’indemnité de logement - qui s’élève actuellement à 60.000 F Cfa - à 100.000 F CFA échelonnés dans le temps. Il sauva ainsi l’année académique 2017-2018 durant laquelle les élèves, pris en otages, avaient perdu quatre mois de cours. Le relèvement de l’indemnité de logement a été le point d’achoppement de la série de négociations entre les syndicats et le gouvernement. Les autorités disaient attendre la finalisation de l’étude sur le système de rémunération des agents avant de prendre toute décision.

C’est ainsi que le processus de partage des résultats du rapport sur le système de rémunération des agents de l’Etat a été lancé par le Premier ministre, Mahammed Boun Abdallah Dionne, en fin juillet. Le but final de cette série de rencontres est d’arriver à une rénovation du système de rémunération, une modernisation et la fiabilisation de la gestion des effectifs et de la masse salariale. Pour atteindre cet objectif, un atelier de partage des conclusions de l’étude a été lancé hier, mercredi 29 août, pour corriger les imperfections d’un système désarticulé.

La démarche utilisée par les services du ministère de la Fonction publique a été largement fustigée par les syndicats appelés à participer aux travaux. Les organisations enseignantes, celles de la santé et autres centrales syndicales sont restées sur leur faim après une brève présentation des résultats de l’étude. Les syndicalistes devront se contenter des considérations générales contenues dans l’extrait du rapport.

Saourou Sène du Saemss, Abdoulaye Ndoye du Cusems, Ibrahima Wane de la Csa, Mballo Dia Thiam et Sidya Ndiaye de And Gueusseum, ont tous pris la parole pour charger les autorités gouvernementales. En fustigeant l’absence de Mariama Sarr, ministre en charge du dossier, ils ont déchiré l’extrait du rapport et exigent le document en entier pour disséquer les contours de cet audit à partir desquels ils formuleront des recommandations.

Dans une perspective de jouer la carte de l’apaisement d’un système scolaire mis à genou par des crises récurrentes et surtout cycliques, pourquoi le gouvernement ne mettrait-il pas à la disposition des syndicats le rapport complet de l’audit du système de rémunération ? Que cache-t-il vraiment ? Pourquoi la deuxième étude sur le même sujet, demandée par Macky Sall à l’Inspection générale d’Etat (IGE), n’est pas déclassifiée et mise à la disposition des acteurs pour engager des discussions scientifiques ? A défaut de toutes ces informations utiles pour un échange efficace, les représentants des organisations syndicales devront travailler sur une base connue: le système est désarticulé et à plusieurs vitesses avec des disparités en termes de traitement salarial.

UNE INDEMNITE DE 500.000 F CFA AUX EPOUSES DES AMBASSADEURS

Si le pouvoir actuel peine à rationaliser le système de rémunération des fonctionnaires, c’est à cause des disparités dans la progression de carrière, d’un corps à l’autre, des contrats spéciaux dont les niveaux de rémunération sont supérieurs à ceux des autres agents, fonctionnaires ou non. Sur les régimes, le rapport note, entre 2004 et 2006, une augmentation de 90% des indemnités. Ibrahima Dally Diouf, maître de conférences à l’université de Dakar, va plus loin en expliquant qu’«en plus des 11 primes et indemnités qui existaient avant 2004, l’Etat a créé 12 autres nouvelles indemnités». La question que l’on se pose désormais, c’est quels agents de l’Etat en bénéficient?

Avant même la finalisation du rapport d’audit, le gouvernement pose des actes en porte-à-faux avec le discours tenu devant les enseignants. En effet, le chef de l’Etat avait pris un décret pour accorder une indemnité de 500.000 F CFA aux épouses des ambassadeurs. Ce qui avait soulevé l’ire des enseignants à qui on refuse une indemnité de plus de 60.000 F CFA.

UNE INDEMNITE ALLANT DE 1 MILLION A 150.000 F CFA AUX MINISTRES…ET AUTRES HAUTS FONCTIONNAIRES

Dans une de ses contributions, l’inspecteur de l’éducation à la retraite, Mody Niang, a rappelé que «Macky Sall a pris un décret n° 2014-769 du 12 juin 2014 fixant les conditions d’attribution et d’occupation des logements administratifs. Selon lui, ce décret attribue des indemnités nettes d’impôt allant d’un million (100.0000) à 150.000 francs, en passant par 700.000, 500.000, 400.000, etc. Ces indemnités substantielles, poursuit-il, ont été attribuées sans état d’âme à des compatriotes déjà privilégiés, dont nombre d’entre eux ont plusieurs maisons. Ce sont en général des ministres et autres ministres conseillers, des magistrats, des officiers supérieurs et généraux, des directeurs de cabinet, des secrétaires généraux de ministères et d’autres hauts fonctionnaires».

Mody Niang pousse sa réflexion en faisant une comparaison: «les enseignants de tous les ordres perçoivent 60.000 F CFA d’indemnité de logement là où le policier gardien de la paix (niveau Cfee) a une indemnité de 75.000 F CFA, l’inspecteur de police niveau Bfem, 100.000 F CFA, l’officier de paix avec Bac+2, 150.000 F CFA, le commissaire de police avec licence+2, 200.000 F CFA». Toujours dans son argumentaire, il explique les disparités au sein des fonctionnaires: «l’indemnité de logement du président de la Cour suprême, du Procureur général près la Cour suprême, du président de la Cour des Comptes avec Maîtrise+2 ans, est fixée à 1 million de F CFA».

AGGRAVATION DU DESEQUILIBRE DU SYSTEME

Pour Ibrahima Sène du Pit/Sénégal, «ce déséquilibre entre le montant du «salaire indiciaire» et celui des «indemnités et primes» a continué de s’accentuer, comme cela est reflété dans les Budgets 2015 et 2016». Dans son texte, M. Sène développe: «en 2015, le montant des «indemnités et primes» de 181,5 milliards représentaient 1,7 fois la «solde indiciaire» qui se situait à 105,6 milliards, et 37% de la masse salariale. De même, en 2016, ce montant a atteint 201,5 milliards représentaient 1,87 fois la «solde indiciaire», et 40% de la masse salariale». Pour lui, l’augmentation de «l’indemnité de logement» des enseignants, va aggraver le déséquilibre du système de rémunération de l’Etat».

Si l’Etat n’a pas encore publié les détails du rapport, Saourou Sène semble trouver un début de réponse. En effet, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de l’atelier de partage, il a fait savoir que l’un des intervenants a mentionné que les enseignants représentent 77% des agents de la Fonction publique et consomment 14% du budget. Les agents des autres corps consomment tout le budget. «Quelles disparités !». «Les enseignants constituent 70% des agents de la fonction publique, alors qu’ils consomment 12% de la masse salariale. 30% des autres agents de l’administration utilisent 80% des salaires».

EVOLUTION DES PRIMES ET INDEMNITES : DE 47 MILLIARDS EN 2004 A 149 MILLIARDS EN 2012

Dans un document présenté par le directeur du Renouveau du service public, Salif Kandé, il a été mentionné que «la seule rubrique primes et indemnités qui passait de 47 milliards en 2004 à 58 milliards en 2005, soit une hausse de 12 milliards seulement, a explosé en atteignant les 149 milliards en 2012. Cette augmentation se justifie par «une évolution ininterrompue» des effectifs de la fonction publique qui sont passés de 66.000 en 2000 à 130.000 en 2018». Une hausse fulgurante des indemnités octroyées aux agents. Mais pour quelle catégorie de fonctionnaires ? Voilà la grande équation des organisations syndicales.

Pour Mamadou Camara Fall, directeur de Cabinet du ministre de la Fonction publique, «cet atelier aidera davantage à une meilleure prise de décision pour que le système de rémunération retrouve un équilibre». Lors de la cérémonie d’ouverture, il a relevé que «le gouvernement voudrait que la rentrée prochaine soit des plus stables et plus calme, au bénéfice des secteurs de la santé et de l’éducation».

Ibrahima Baldé
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