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El Hadj Issa Sall (candidat Parti de l’Unité et du Rassemblement) :‘’On ne peut parler d’indépendance de la justice tant que le lien de subordination à l’Exécutif subsistera’’
Publié le mardi 31 juillet 2018  |  Enquête Plus
Pr
© Autre presse par DR
Pr El Hadj Issa Sall, coordonnateur du PUR
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Si vous voulez le faire sortir de ses gonds, parlez-lui de ‘’parti religieux’’ en pensant seulement au Pur (Parti de l’unité et du rassemblement). Toutes griffes dehors, le professeur El Hadj Issa Sall, né le 25 janvier 1956 à Tattaguine, titulaire d’un diplôme de technologie option électronique et candidat du Pur à la prochaine présidentielle, se jette sur les auteurs de telles déclarations. Sans détours, ni langue de bois, il aborde également les questions brûlantes de l’heure. Entretien !

Quel regard portez-vous sur les derniers rebondissements dans l’affaire Khalifa Sall ?

Ce procès étant politique, nous ne sommes nullement surpris qu’il prenne cette tournure. Tout le monde le sait, le pouvoir cherche à empêcher Khalifa Sall de se présenter à l’élection présidentielle. C’est pourquoi on est en train d’accélérer la procédure. Khalifa, le sachant, a préféré ne plus obtempérer avec ce tribunal. Je ne dirais pas si c’est un bon ou mauvais choix, mais puisqu’il sait, à l’instar de tous les Sénégalais, qu’il sera condamné, il a pris l’option de ne plus obtempérer et je le comprends.

Le procureur général Lansana Diabé a pris, au cours de ce procès en appel, des positions que d’aucuns ont considéré comme courageuses. Les partagez-vous ?

Je ne peux juger sa posture. Un procureur, c’est aussi un magistrat. Au début, il a fait comprendre qu’il faut respecter la décision de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest et je ne pense pas qu’il l’ait retiré. Il l’a dit et réaffirmé. Le procès est toujours en cours, je pense que le juge tiendra compte de cette réquisition du procureur.

Cela ne montre-t-il pas que nous avons des magistrats crédibles et qu’il faut les laisser faire leur travail ?

Moi, je ne crois pas à la justice comme pouvoir. J’ai toujours considéré que le seul pouvoir qui existe dans une République, c’est le Législatif, car ce sont les députés qui représentent le peuple, seul détenteur de la souveraineté. L’Exécutif et le Judiciaire ne sont pas des pouvoirs, d’après ma conception de la République. Tous les deux ont pour obligation d’exécuter les lois votées par le parlement. Mais puisqu’en l’état actuel des choses, on considère la Judiciaire comme pouvoir, je mets ça entre guillemets, je pense que son indépendance est liée à ses différentes composantes, c’est-à-dire les personnes physiques qui l’animent. Maintenant, il est clair qu’au Sénégal, il y a une subordination du Judiciaire par rapport à l’Exécutif, puisque le parquet dépend du ministère de la Justice. On ne peut donc parler d’indépendance de la justice tant que ce lien de subordination subsistera.

Par contre, pour ce qui est des magistrats assis, leur indépendance est liée à leur conscience. En principe, rien ne les empêche d’être indépendants, s’ils le veulent.

Vous dites que, selon votre conception, il n’y a que le pouvoir Législatif. Est-ce à dire que vous militez pour un régime parlementaire fort ?

Ce n’est pas une question de régime parlementaire ou présidentiel. Ce cloisonnement qui dit que vous êtes ceci ou cela, je pense que c’est quelque chose qu’il faut dépasser. Ce qui est important, c’est de savoir que c’est le peuple qui a le pouvoir. Et il l’exerce par le biais de l’Assemblée nationale. Qu’on soit dans un régime présidentiel ou parlementaire, l’essentiel est d’encadrer les pouvoirs des uns et des autres. Que le Législatif ou l’Exécutif ne puisse pas faire ce qu’il veut.

Avec le recul, ne pensez-vous pas que Khalifa Sall aurait pu mieux gérer ces fonds objet des poursuites ?

Je ne réponds pas à cette question parce que quand la base est fausse, tout le reste est faux. Je sais que ce procès est politique. Étant un procès politique, je n’entre pas dans le fond du dossier.

Vous revendiquez quand même être un parti qui défend des valeurs. Pensez-vous que la manière dont ces fonds ont été gérés a été vertueuse ?

Je pense que vous ne m’avez pas bien compris. J’ai dit que c’est un procès politique. En tant que tel, je n’entrerai pas dans les détails en disant qu’il a bien ou mal géré. Beaucoup de maires avant lui ont fait la même chose. Ce qui me gêne est donc pourquoi Khalifa et non les autres.

Il n’y a donc pas, à votre niveau, de paradoxe à défendre ce maire à qui l’on reproche une gestion peu orthodoxe…

(Il coupe) Mais qui lui reproche une gestion peu orthodoxe ? C’est ceux qui politisent cette affaire, c’est-à-dire les gens du régime. Si Khalifa avait accepté d’être à côté du régime, il ne serait jamais jugé.

Si le Pur était à la tête de cette institution ou d’une autre, allait-il agir de la sorte, c’est-à-dire utiliser de fausses factures pour justifier l’utilisation de fonds d’une régie d’avance ?

Si nous étions au pouvoir, tout cela serait clarifié de telle sorte qu’il n’y ait pas de confusion. Le problème avec l’actuel régime, c’est qu’ils font deux poids, deux mesures. On a entendu le président de la République dire qu’il a mis des dossiers sous le coude. Cela traduit qu’il y a effectivement une justice sélective.

Indépendamment de l’affaire Khalifa Sall, ne pensez-vous pas qu’il y a lieu de revoir la gestion des fonds politiques au Sénégal ?

Nous, nous sommes pour l’encadrement des fonds politiques. On ne peut dire que le président de la République a des fonds politiques et qu’il en fait ce qu’il veut. Cela ne veut pas dire que nous sommes contre le fait qu’il y ait des fonds politiques. Ce qui pose problème, c’est que quelqu’un puisse les utiliser à sa guise sans avoir à se justifier. Il faut donc un encadrement de ces fonds. Qu’on puisse vérifier si l’argent a été utilisé à bon escient ou pas. Et ça doit être valable pour tout le monde : chef de l’État, maires…

Aujourd’hui, ce sont les coupures d’eau qui perturbent le plus la quiétude des Sénégalais. Comment le vivez-vous ?

C’est très difficile. Je le vis au même titre que tous les Sénégalais. Comme je l’ai déjà dit il y a un jour, quand j’ai voulu prendre ma douche, j’ai été obligé d’aller à la boutique du coin acheter de l’eau minérale pour me baigner. Ça devient récurrent et au-delà de ce problème conjoncturel, il y a des quartiers dans Dakar qui, depuis des dizaines d’années, n’ont pas d’eau. C’est un véritable problème et il faut le régler, car c’est un minimum. L’eau, l’électricité, la santé, l’éducation, ce sont des besoins vitaux que tout gouvernement doit pouvoir résoudre. C’est un problème de base. Même au premier millénaire, on ne devrait pas avoir de tels problèmes. D’autant plus que le Sénégal est un pays humide. Nous avons l’océan Atlantique qui longe toute la partie ouest de notre pays ; à l’est, nous avons le fleuve du nord au sud. Nous avons aussi des lacs et cours d’eau. Je ne dirais pas que les gouvernants sont incompétents, je n’aime d’ailleurs pas ces types de jugement. Je dirais seulement qu’ils ont un problème de vision et de priorité.

Selon vous, l’État, dans le cadre de l’attribution de ce marché, devrait-il opter pour la continuité avec la Sde ou pour le changement ?

Je ne peux répondre à cette question. L’essentiel est que le marché soit attribué dans des conditions de transparence, en tenant compte de l’intérêt du pays. C’est valable pour tous les marchés du pays.

Certains ont dénoncé qu’il n’y ait que des Français à l’arrivée…

(Il coupe) Le terme Français, Américain ou Chinois ne m’intéresse pas. Cela frise la xénophobie. Ce qui m’intéresse, c’est de respecter les conditions de transparence et des intérêts exclusifs du Sénégal. Nous sommes dans un monde globalisant, il faut cesser l’ostracisme. Il faut que, dans ce pays, nous ayons des ambitions, l’ambition d’aller, demain, en compétition dans des marchés d’autres pays, y compris en France.

A quelques mois de l’élection présidentielle, on assiste à une floraison des déclarations de candidature. N’est-ce pas une banalisation de cette fonction présidentielle et cela n’arrange-t-il pas le camp du pouvoir ?

Non ! Je ne pense pas que c’est une banalisation. De ce que je sais, tous ceux qui se sont déclarés ont le profil de l’emploi. Ce sont de fortes personnalités qui ont beaucoup d’expérience dans la gestion d’un pays. Ils ne sont pas moins méritants, moins compétents et n’ont pas moins d’ambition et d’amour pour leur pays. Sinon, je considère qu’il faut à l’opposition de très fortes candidatures qui feront que le président aille au second tour. Peut-être même qu’il n’ira pas au second tour. Tout est envisageable. Quand on va à des élections, il faut prévoir tous les scénarios. Ce qui est constant, c’est que le régime soit dans une tendance baissière depuis 2012.

Vous avez été désigné candidat du Pur. Irez-vous seul à cette élection comme aux législatives ou en coalition ?

C’est l’union qui fait la force. Si on a la possibilité d’aller à la présidentielle avec d’autres partis ou mouvements, nous sommes preneurs. Nous ne sommes pas allés seuls aux législatives parce que nous le voulions. Nous avions discuté avec d’autres, mais nous ne sommes pas tombés d’accord. Nous espérons qu’avec la prochaine élection, ce ne sera pas le cas.

Le Pur est-il prêt à se ranger derrière un autre candidat ou bien vos futurs partenaires devront nécessairement se mettre derrière vous ?

Ce n’est pas un problème de rangement. Nous ne réfléchissons pas en ces termes, mais en matière de collaboration. Il est clair qu’il faudra des critères objectifs. Les élections, c’est avant tout une question de légitimité, de suffrages. On ne peut pas aller aux élections avec quelqu’un qui ne peut pas nous apporter suffisamment de voix. Et je pense que nous faisons partie des formations qui ont le plus de voix. Nous avons notre candidat qui est du Pur. Si, dans le cadre d’une coalition, il y a une personne qui est plus méritante, on n’a aucun problème avec ça. L’essentiel, pour nous, est qu’il y ait alternance dans ce pays.

Vous vous êtes beaucoup battus contre le parrainage, mais vous avez perdu ce combat. N’est-il pas temps pour l’opposition de se pencher sur comment sécuriser le scrutin en commençant par être présent dans tous les bureaux de vote ?

Maintenant que le parrainage est devenu une loi, on est obligé de faire avec. ‘’Dura lex sed lex’’. Mais cela ne traduit pas un échec de l’opposition. Maintenant, nous sommes en train de travailler dans cette dynamique également pour la sécurisation du vote. C’est vrai que c’est le parrainage qui était d’actualité, mais il n’y a pas que ça. Nous nous organisons en conséquence pour une élection démocratique, libre et transparente. Nous avons, tous, les mêmes intérêts. Si le Pur est dans un bureau, c’est aussi pour représenter toute l’opposition et c’est la même chose pour les autres qui feront preuve de solidarité dans les bureaux de vote.

Cette solidarité au sein du Front de résistance que vous avez constitué n’est-elle pas que de façade ?

Absolument pas ! Vous avez vu la marche qu’on a organisée récemment. La solidarité de l’opposition est naturelle. Demain, si un parti va au second tour, il va de soi que nous allons tous le soutenir. Maintenant, cela va de soi que chaque parti a son autonomie, chaque parti veut arriver premier, c’est de bonne guerre. Mais cela n’enlève en rien la solidarité entre les uns et les autres.

Est-ce qu’il n’est pas dans l’intérêt du Pur de laisser le régime écarter des candidats comme Karim Wade et Khalifa Sall ? Répondez honnêtement.

Ah non, du tout ! Ce serait d’ailleurs très maladroit qu’un parti de l’opposition profite de cela sous le prétexte que c’est à son avantage. C’est même honteux. Nous ne sommes pas dans ça. Pour nous Pur, c’est Dieu qui choisit celui qui sera président. Nous combattons et continuerons de combattre cette injustice. Nous ne sommes pas là pour profiter du malheur des autres.

Aujourd’hui, n’est-il pas temps d’encadrer la constitution des coalitions, de les interdire ne serait-ce que pour le premier tour, comme ça se fait dans certains pays ?

Cela dépend des acteurs. Je pense que les coalitions de partis politiques peuvent exister sous une autre forme. Si on supprime les coalitions, par exemple, on peut se retrouver avec des partis qui fusionnent. Et cela entrainerait la disparition de certains. Prenez la coalition Benno Bokk Yaakaar qui compte plus de 100 membres, si on supprimait les coalitions, aucun de ces partis ne serait capable de remporter des élections. Certains ne pourront jamais, dans ce cas, briguer le suffrage des Sénégalais.

Pour la première fois de l’histoire du Sénégal, le Parti socialiste n’aura pas de candidat. Quelle appréciation en faites-vous ?

Je ne fais pas partie de cette formation, donc je n’ai aucun commentaire. C’est quand même très dommage que des structures comme le Ps ou l’Afp acceptent de ne pas aller aux élections, mais c’est leur problème.

Certains vous collent l’étiquette de parti religieux. Est-ce un avantage ou une faiblesse ?

Ce sont les ignorants qui le font. C’est-à-dire quelqu’un qui ne sait pas comment fonctionne le pays. Quelqu’un qui ne sait pas ce que dit la Constitution, à ce propos, peut avancer de tels propos. Quelqu’un qui connait les textes ne peut poser une telle question. Puisqu’il y a des gens qui le font, c’est parce qu’il y a un problème de connaissance des lois de ce pays. Et je ne peux rien contre cette ignorance.

MOR AMAR
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